La Nuit Etoilée fu
t une revue illustrée rédigée par des artistes, des écrivains et des chercheurs internationaux.
Son regard exigeant et libre parcourait les arts passés et présents,
l'image et le langage,
dans des travaux inédits et de qualité.

Ce blog réunit quelques articles des 7 numéros parus de 2010 à 2012.

mardi 14 février 2012

Elévation. Optimiser, décupler


Ascension vers l'Empyrée, détail des Visions de l'Au-Delà
de Hieronymus Bosch, 1500-1504

Par Eléonore Diane Dupret

L'élévation comme mouvement, comme attirance vers un paysage fait d'extrême et d'infini ; l'optimisation et le décuplement comme moyens vers cette élévation : définitions.

Élévation

Qu'est-ce que l'élévation?
C’est un mouvement de l’être vers une extrémité qui nous dépasse et nous attire, nous étire et nous aspire.
L’élévation a la couleur de l’or violet, un or orangé, teinté d’une pointe de magenta. L’élévation est un rapport à l’extrême. J’entends par extrême l’analogie suivante : il est à l’âme, ce que les extrémités sont à  la terre – les extrémités en tant que manifestations extrêmes de la création de Dieu.
Le désert silencieux et brûlant,
les pôles extrêmes, entièrement blancs et glacés,
les sommets des montagnes enneigés.
Peut-être aussi les volcans, les grands canyons rouges de l’Arizona. Et cætera.
Quand nous sommes en ces lieux, par exemple au sommet d’une montagne haute, au milieu des autres montagnes hautes, nous regardons l’horizon : « sauvage est la proximité du sacré ». Mais l’élévation, c’est précisément le moment où nous gravissons la montagne, les joues saisies et brûlées par le vent glacé, qui piquent et qui contrastent avec la chaleur intérieure que nous émettons par notre marche en montée.

L’élévation  est l’horizon vertical, la soif qui se désaltère[1] de sa soif.
Elle est profondément liée à la liberté qui lui donne son horizon et la possibilité d’y accéder.
L’élévation elle-même génère la liberté intérieure. Et lorsque l’élévation est vraiment matérialisée, façonnée, travaillée, elle génère aussi une grande liberté de mouvement.
Nota : (de élever, lever) l’élévation est soleil levant, la jeunesse des premiers rayons, la pureté des notes neuves : « Ô Beauté si ancienne et si neuve, bien tard je t’ai aimée. »[2] Elle est désir gai ou amer[3], le désir latin qui vient de de-siderare : contempler un astre ou constater son absence : « Lorsque l’âme désire quelque chose,  tout le corps devient plus agile et plus disposé à se mouvoir, qu’il n’a coutume d’être sans cela. Et lorsqu’il arrive que le corps est ainsi disposé, cela rend les désirs de l’âme plus forts et plus ardents .»[4] Elle est la profondeur d’un lever de soleil. Un moteur matériel ou immatériel qui tend à prendre corps.

Optimiser : développer entièrement en acte, ce qu’il y a en puissance, donner le meilleur, réaliser.
Décupler : (latin, multiplier par dix). Multiplier par dix les possibilités d’un être, d’une action, d’un objet. Dans le phénomène du décuplement, l’énergie n’est pas consommée mais se régénère dans l’action ou suit son cours.



[1] Ou nourrit.
[2] Saint Augustin, Confessions X, 27, 38
[3] Il y a l’élévation brûlante contactée par la souffrance qui meut notre âme, malgré nous à aller plus loin qu’elle n’est ; mais il y aussi l’élévation de la gaité, ou de la joie qui nous transporte d’un seul bon, au cœur du courant ascendant.
[4] Descartes, Des passions de l’âme, art. CXI, Au Désir.

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